Boum.

Voilà un bouquin qui colle une petite détonation à ma liste de lecture. Par son message, par son histoire, par son style, il m’alaissé songeur –voire sous le choc– après l’avoir refermé.

Son style tout d’abord : compact et dense, avec très peu de dialogues, il va à l’essentiel dans des phrases très courtes qui,bien que n’étant pas rédigées à la première personne, reflètent les pensées des acteurs.Dès les premiers événements, ce style à lui seul m’a tenu, haletant, à la recherche d’une accalmie. Avec parfois quelques tentativesde philosophie plus ou moins compréhensibles : « Dans le cas d’Armando Santoya, les iniquités venaient principalement de lui,même si l’on peut dire à sa décharge que le monde ne l’avait pas particulièrement aidé et que le fardeau qui lui avait été assignépar le démiurge qui voudrait bien se reconnaître comme tel devait à présent s’élever jusqu’au ciel. » Même en la recopiant,je ne suis toujours pas certain de la signification à en retirer…

Une autre force de ce bouquin est qu’il n’y a pas à proprement parler d’intrigue. Juste une histoire, racontée de A à Z. Deux histoiresen fait, mêlées de telle sorte que l’anti-héros de l’une (le mal-aimé Sam Fahey, issu d’une famille de sinistre réputation,ex-surfeur et éleveur de lombrics) est malgré lui le héros de l’autre histoire (celle où une activiste s’opposant aux pollueursaméricains est abandonnée pour morte après une laborieuse tentative d’assassinat). Une histoire dans laquelle seul le lecteur saitque le méchant n’est pas celui qu’on croit… Une histoire entièrement centrée sur trois personnages singuliers.

Par petites touches, on découvre le vrai Fahey ; par petites touches se construisent, avec beaucoup de sensibilité, des liens entre Faheyet Magdalena ; par petites touches se découvrent les motivations du chasseur qui les traque… Et même si les acteurs passent beaucoupde temps les-deux-pieds-les-deux-mains-dans-la-merde, au sens propre comme au sens figuré, le style presque brutal laisse une grande placeà une émotion discrète et sincère.

Et puis il y a aussi le message, émis violemment en début de bouquin et qui reste sous-jacent ensuite. Un message qui dit en quelque sorte »Et si vous jetiez un coup d’œil sur les méfaits du capitalisme à la frontière entre le Mexique et les USA ? » Quelques paragraphes, quelqueschapitres qui dénoncent sans fard les impacts environnementaux et humains des « usines de recyclage » qui traitent les déchets américains…

Un pur coup de cœur.

Traduit de l’américain par Natalie Zimmermann.